En bordure du village, le château-ferme de Spontin s’étale le long du Bocq qui, grâce à quelques retenues d’eau, se transforme en larges douves autour de la vieille demeure seigneuriale, des douves jadis bien plus importantes.
Le complexe castral proprement dit se compose d’une enceinte médiévale en quadrilatère, flanquée jadis de quatre tours d’angle et contre laquelle s’adossent, depuis le début du XVe siècle, de nouveaux corps d’habitation qui ont largement ouvert les courtines d’antan. À l’arrière, lorsqu’on a franchi le pont-levis et le châtelet d’entrée, émerge un solide donjon en pierre, en partie caché par les constructions précédentes.
À l’opposé, à l’est, s’étale une vaste ferme en U, datée de 1622, à laquelle donne accès une robuste tour-porche d’allure quelque peu Renaissance.
L’ensemble, classé comme monument par arrêté du régent du 14 janvier 1950 (à la fois comme monument et comme site), illustre parfaitement l’évolution d’une habitation seigneuriale du Moyen Âge à nos jours. En fait, quatre étapes se succèdent dans l’édification de l’ensemble, que l’on peut résumer comme suit : donjon médiéval, enceinte et châtelet d’entrée, logis seigneurial, puis ferme en U, étalées sur une période allant de la seconde moitié du XIIIe siècle au XVIIe siècle. À l’origine, vers le XIIe siècle, le château de Spontin est une simple « tour défensive » carrée, destinée sans doute à protéger – ou à taxer – les usagers de l’antique voie romaine Dinant-Huy (toujours appelée li rouwale di Hu) qui traversait la rivière du Bocq à proximité, à la faveur d’un gué. Après de hauts faits d’armes à la fin du XIIe siècle, Guillaume « l’Ardennais » transforme le bâtiment primitif en une demeure fortifiée de trois étages, aux murs plus épais.
Construit probablement entre 1266 et 1284, la bâtisse primitive impressionne par ses dimensions qui la classent parmi les réalisations comparables les plus importantes qui nous soient parvenues : 15,70 m sur 11,45 m pour une hauteur de près de 17 m au sommet de la corniche. Sa qualité architecturale est tout aussi éloquente. D’allure défensive, le donjon se caractérise avant tout comme un lieu d’habitation où les commodités de l’époque sont rassemblées pour conférer luxe et confort aux espaces intérieurs.
Le volume originel comptait quatre niveaux comme aujourd’hui, représentant 277 m2 de surfaces habitables, ce qui est considérable pour l’époque. Au rez-de-chaussée plus opaque se succèdent les niveaux supérieurs plus éclairés, les baies actuelles témoi¬gnant de remaniements déjà anciens. Mais c’est à l’intérieur que se révèle le mode de vie hors du commun de ses occupants. Au-dessus de deux caves couvertes d’un berceau en plein cintre, on trouve successivement la cuisine, la belle pièce, l’étage nocturne et, enfin, le grenier, tous reliés entre eux par les volées droites d’un escalier intramural.
Aux XIVe et XVe siècles, la maison forte se voit englobée d’une enceinte protectrice et d’un châtelet d’entrée défendu par deux tourelles de défense et par des douves. Ses deux tours circulaires encadrent un passage voûté dont l’accès n’est rendu possible que par le pont-levis le précédant.
Durant les XVIe et XVIIe siècles, les fortifications étant devenues inutiles, s’opère une mutation progressive du château-fort au profit d’une « belle demeure », correspondant au mode de vie plus confortable de ses habitants. La construction du spacieux corps de logis atténue encore davantage l’aspect défensif primitif de l’ensemble, avec le percement de fenêtres et la construction des toitures sur les tours.
Le donjon lui-même reçoit de nouveaux percements et connaît des aménagements internes. Les deux dernières transformations sont la construction de la ferme fortifiée (1622) et la démolition d’une partie des fortifications arrière.
À la fin du XIXe siècle, la famille de Gourcy procède à des aménagements intérieurs des salons, sous la direction de l’architecte gantois Auguste Van Assche, disciple de Bethune, mais sans interventionnisme trop accru.